Oui, on peut qualifier d’historique la visite du 4 septembre 2013 de François Hollande accompagné du président allemand Joachim Gauck à Oradour-sur-Glane. La date n’a pas été choisie au hasard. C’est en effet le 4 Septembre il y a soixante quatorze ans, que la France et la Grande-Bretagne déclarèrent la guerre à l’Allemagne.
C’est le 10 juin 1944, alors que l’Allemagne est déjà à coup sûr vaincue, que des SS ont, avant de partir, assassiné 642 per- sonnes et rayé de la carte le village d’Oradour-sur-Glane. Cette méthode leur était familière et le massacre probablement planifié. De nombreux villages sur le front de l’Est ont connu le même sort avec des assassinats de civils, sans doute pour éliminer de possibles résistants cachés, ce qui n’était pas le cas pour Oradour. Ce massacre a été purement gratuit.
Cet acte inutilement cruel est resté gravé dans les mémoires. Il n’est donc pas anodin que, aujourd’hui, pour la première fois, un président allemand, alors que l’on célèbre aussi les 50 ans du traité d’amitié franco-allemand, se rende dans le village martyr resté en l’état depuis ce sinistre jour, pour rendre hommage aux victimes.
La visite s’est déroulée sans “pompe”, de façon quasi intime. Les deux présidents ont parcouru le village dévasté et silencieux en compagnie de deux rescapés qui racontaient, comme si cela s’était déroulé hier, les tragiques événements de cette mémorable journée. L’instant le plus émouvant de cette cérémonie a été celui où les présidents Hollande et Gauck, en compagnie de Robert Hébras, un des rescapés, se sont recueillis dans l’église et en sont sortis “enlacés”, partageant ainsi un réel moment de communion.
Cette cérémonie permettra aussi probablement de parachever la réconciliation entamée en 1999 par Jacques Chirac entre l’État et Oradour. Ce contentieux tient au fait qu’il y avait, dans l’unité qui a exterminé les habitant d’Oradour, des ressortissants français “les malgré-nous” originaires des départements annexés d’Alsace et de Moselle, contraints pendant la guerre de porter l’uni- forme allemand. Ces 14 “Alsaciens” ont été jugés avec les Allemands ce qui indigna les Alsaciens qui réclamèrent la clémence, alors que dans le Limousin, au contraire, un châtiment exemplaire impitoyable fut demandé pour tous les inculpés. Après quelques tergiversations les Alsaciens ont été amnistiés et le contentieux est demeuré.
On le voit, cette visite revêt de multiples dimensions et on peut penser qu’aujourd’hui entre Oradour, l’Allemagne et la Fran- ce, les comptes sont enfin apurés.
70 ans après, c’est long… Mais ne dit-on pas “mieux vaut tard que jamais”?
Lison Benzaquen