Mai 1954 reddition du corps expéditionnaire français à Bien Bien Phu.
1er novembre 1954, début de ce qui allait devenir la guerre d’Algérie avec l’assassinat de l’instituteur Monnerot. Pendant des années un certain silence sur cette période s’est installé en France du moins, par les pouvoirs publics et beaucoup de médias.
Ce 50ème anniversaire de la fin des hostilités a entraîné un déferlement d’informations sans autant organiser une commémoration officielle. C’est pourquoi, que pourrais-je ajouter à ce qui a été dit ou écrit même au sein de notre journal ?
Est-ce nécessaire de dire encore l’histoire de ces événements devenus opérations de maintien d’ordre, puis opération de police pour enfin être appelés guerre? Aussi je me contenterai de parler de ma propre expérience, de mes souvenirs, de ce que j’ai pu vivre pendant presque deux années que j’ai passées en Algérie comme près de deux millions de mes contemporains.
Quelle mémoire peut-on avoir ? J’avais déjà relaté, il y a quelques années dans notre journal en publiant une lettre que j’avais écrite en décembre 1957, ce que je ressentais au cours de ces opérations militaires. 50 ans ont passé et la tristesse a pris le pas sur la passion. Tristesse pour toute cette “criminelle imbécillité” comme vient de l’exprimer Bernard Guetta dans une chronique radio ces jours-ci. Criminelle oui, car tout aurait pu être évité : 30.000 soldats morts, 100.000 blessés, 400.000 Algériens, civils,FLN… Des milliers de Harkis tués après 1962.
Oui, il fallait mettre un terme à cette guerre sans issue, oui les circonstances des accords ont été désastreuses… mais il le fallait. Et depuis, quelle mémoire ? Notre dernière séance sur la guerre d’Algérie avec la projection du film de P. Schœndoerffer, L’honneur d’un capitaine, a fait remonter à ma mémoire, jamais complètement enfoui, tout ce que j’avais vécu.
A mon retour en 1959, j’ai mis un an à me remettre, puis j’ai appris à ne plus culpabiliser jusqu’à ces derniers jours. Et pourtant je n’ai rien à me reprocher, sauf d’avoir participé à ce qui n’aurait jamais dû être : une guerre d’une violence inouïe, qui malgré tout m’a permis d’engager toute mon existence à ma place, dans la défense des droits de l’homme partout, d’une certaine idée de la République française et de poursuivre ainsi à ma petite place, ce que m’avait enseigné mon père.
Daniel Rachline