Journal d’Avril 2020 : L’Inde a de nouveau besoin du message de Gandhi

Un siècle après le combat de Gandhi pour l’indépendance de l’Inde, et pour l’arrêt des violences entre musulmans et hindous, une loi votée en décembre 2019, vient relancer une flambée de haine.

Le 11 décembre 2019, le Citizenship Amendment Act a été adopté par le Parlement indien. Le BJP, Parti nationaliste hindou de Narendra Modi a fait adopter cette loi qui régularise les réfugiés venus des pays voisins, Afghanistan, Pakistan, Bangladesh à l’exclusion des réfugiés musulmans. Le vote de cette loi a déclenché un vaste mouvement de protestation à travers tout le pays. 

Fin février 2020, à New-Delhi, les nationalistes hindous se sont livrés à un déchaînement de violences contre les musulmans. Sophie Landrin, correspondante du Monde à New-Delhi, a rencontré dans un hôpital, 200 survivants et blessés de ce massacre. Les témoignages sont glaçants. Les assaillants ont attaqué les quartiers musulmans armés de pierres, de sabres, de bâtons et d’acide. Ils ont mis le feu aux maisons et aux échoppes tenues par des musulmans. Des victimes ont été frappées à mort puis jetées dans les égouts à ciel ouvert. Durant trois jours de folie meurtrière, 47 personnes ont été tuées, 122 maisons et 322 magasins ont été détruits. Des mosquées ont été détruites, d’autres saccagées, mais les temples hindous ont été épargnés. Depuis, un calme apparent est revenu mais les populations vivent dans la crainte de nouvelles attaques. De nombreuses familles fuient ces quartiers. 

Ces violences de février 2020 sont orchestrées par des nationalistes hindous extérieurs à ces quartiers. Le résultat recherché est l’installation d’une violence radicale dans ces quartiers mixtes où la cohabitation entre musulmans et hindous se déroulait en paix. Michelle Bachelet, haut-commissaire de l’ONU a demandé à se joindre au recours en justice contre cette loi controversée sur la citoyenneté. Le ministre des affaires étrangères indien a réagi : “le Citizenship Amendment Act est une question interne à l’Inde et touche au droit souverain du Parlement indien à faire des lois.” 

Le CAA, réforme de la nationalité sur des critères religieux, attise de nouveau les violences interreligieuses, longue plaie de l’Histoire indienne.  Rappelons que la laïcité est inscrite dans la Constitution. Mais Le 15 août 1947, jour de la naissance de l’Etat indien souverain, Gandhi est absent. Il jeûne en protestation contre la partition de l’Inde et du Pakistan. Cette partition a créé ce mauvais partage de l’ancien l’empire britannique des Indes, en deux états séparés sur la base d’une appartenance religieuse : le Pakistan à majorité musulmane et l’Inde, à majorité hindouiste. Durant les longues tractations qui ont précédé le départ des Britanniques une autre option avait été soutenue par les modérés du congrès indien et la ligue musulmane, celle d’une grande Inde démocratique. Mais le choix de la partition a triomphé. Le 30 janvier 1948, Gandhi, est assassiné par un fanatique nationaliste hindou.  Dès sa création en août 1947, l’Etat indien laïc et multiconfessionnel a connu des guerres religieuses et de dizaines de milliers de victimes ainsi que l’exode de dizaine de millions d’individus. La mémoire douloureuse de ces conflits est toujours opérante. En 1971, le Pakistan s’est séparé en deux. L’ex Pakistan oriental, a fait sécession en 1971 pour devenir le Bangladesh. Depuis 2001, le Pakistan, est au cœur d’inextricables conflits politiques. Voisin de la guerre en Afghanistan, il est le foyer de commandements terroristes et l’Islam est la religion d’état. Les conflits liés à la religion ont débordé dans les pays voisins et en occident. 

La voix de Gandhi, “Père de la nation indienne” manque toujours plus cruellement.

Jacinthe Hirsch

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