Qui aurait pensé qu’au 21ème siècle, les Etats-Unis d’Amérique offriraient le spectacle aussi désolant que révoltant d’un racisme exacerbé et criminel ? Circonstance aggravante, une bonne partie de la classe politique américaine, à commencer par le Président lui-même , est sur la même ligne que ces mouvements racistes et ségrégationnistes regroupés sous le vocable d’ “alt.right”. On croit rêver, ou plutôt cauchemarder !
Bref rappel historique : les Etats-Unis ont pratiqué l’esclavage depuis le début du 16ème siècle, quand la “traite négrière” et le ”commerce triangulaire” battaient leur plein. La guerre de Sécession va alors opposer les états du Nord, qui ont aboli l’esclavage, et ceux du Sud, qui font subir à leurs esclaves des traitements inhumains. Les troupes du Nord du Général Grant finissent par battre celles du Sud commandées par le Général Lee. Le Président Abraham Lincoln, grand artisan de cette lutte contre l’esclavage, est assassiné par un nordiste en 1865, mais l’esclavage est aboli le 31 Janvier 1865. Toutefois, la ségrégation subsiste jusqu’en 1960, mais les blancs racistes du Ku Klux Klan maltraitent, lynchent et vont jusqu’à pendre des Noirs. Rosa Parks et Martin Luther King créent le Mouvement des Droits Civiques. Les Noirs obtiennent en 1965 le droit de vote. Martin Luther King sera assassiné en 1968.
Depuis, hélas, les partisans de la ségrégation ont repris des couleurs, et très récemment, des violences ont éclaté à Charlottesville, en Virginie, faisant plusieurs morts, mais le Président Trump a préféré ne pas pointer du doigt les militants de l’”alt.right”, la “droite alternative”. Cette mouvance d’extrême droite, dont une partie est ouvertement raciste, est un courant large et flou. Elle serait constituée, selon CNN, de “800 groupes haineux”. En fait, on y distingue plusieurs composantes :
1/ Les néo-nazis : le terme d’ “alt.right” a été inventé pour dédiaboliser l’extrême droite américaine classique, et il est utilisé par certains suprémacistes et nationalistes blancs pour se définir eux-mêmes et définir leur idéologie : préservation et protection de la race blanche aux Etats-Unis, en plus de positions conservatrices plus traditionnelles. Ils se réclament ouvertement du national-socialisme d’Hitler: certains groupes ont scandé “blood and soil “, référence au “blut und boden” lancé par les partisans du führer en Allemagne dans les années 30. Certains se disent ouvertement “amoureux de l’armée allemande et des Waffen SS”. Richard Spencer, l’inventeur du terme “alt.righ”, a célébré l’élection de Trump par des “hail Trump, hail notre peuple, hail la victoire”, rappelant ainsi les “heil Hitler”, et les ponctuant de saluts nazis.
2/ Le Ku Klux Klan, organisation raciste et suprémaciste blanche fondée par des officiers sudistes en 1865, coupables de nombreuses exactions contre des noirs, en perte de vitesse cependant, mais toujours dangereux, arborant par ailleurs des tatouages de croix gammées.
3/ Les nationalistes blancs, qui ont les mêmes cibles que les néo-nazis et le KKK. L’un d’eux a reproché à Trump d’avoir marié sa fille à un Juif (antisémitisme, quand tu nous tiens…) Un autre a estimé que “la gauche, la classe capitaliste et la bourgeoisie étaient toutes du même côté juif”, admirant au passage le groupe néo-nazi grec “l’Aube Dorée” et l’hyperviolent “Groupe de Résistance Nordique”, ouvertement nazi.
Toutes ces factions érigent la violence comme un moyen : “We don’t fear the fight, we are the fight”, tel est leur réjouissant cri de ralliement. Et d’autres groupes, ouvertement racistes et activistes, ne cessent d’apparaître…
4/ Enfin, le nombre de Groupes Antimusulmans a explosé, en raison de la peur et du ressentiment suscité par les attaques djihadistes au nom de l’Islam de par le monde. Trump amalgame carrément Islam et Islamisme. La fondatrice d’ “Act For America”, groupement antimusulman le plus actif, a été reçue à la Maison Blanche en mars dernier. Elle a même déclaré avoir une ligne téléphonique directe avec la Maison Blanche. La brave dame ! Dans ces groupes, le discours anti-musulman se mêle de discours antisémite : “Derrière le nègre, caché au loin, comme toujours, il y a la figure plus sinistre du Juif“. Ou encore : “Le nègre est le petit soldat, le juif est le bénéficiaire cultivé”. Fermez le ban, on a déjà entendu ça quelque part…
Tout cela n’est pas très réjouissant, et écorne sérieusement l’image plus que favorable de l’Amérique chez les Européens, et particulièrement chez nous Français. Dame, que se serait-il passé si les Américains ne nous avaient pas prêté main forte en 1915 et en 1942 contre les Allemands puis les Nazis ? Non, nous n’avons rien oublié : pour tout cela, grand merci et reconnaissance éternelle, car sans eux, on était plutôt mal en point ! Personnellement, voir ces sympathiques GI (noirs et blancs) venir nous débarrasser de la gangrène pétainiste raciste, antisémite et déjà suprémaciste, c’était réjouissant. Les “Chantiers de Jeunesse” de Pétain ressemblaient douloureusement aux “Jeunesses Hitlériennes”, alors, quel bon débarras !
Mais la bataille est loin d’être gagnée. Depuis la dernière guerre mondiale, racisme anti-noir, suprémacisme blanc et antisémitisme avéré n’ont cessé de progresser aux Etats-Unis, sans qu’aucun gouvernement n’ait semblé lutter contre. Obama avait fait naître de grands espoirs, mais hélas, il faut bien reconnaître qu’il n’a pas réglé le problème, tant s’en faut… Et ce n’est pas le pantin peroxydé qui règne à la Maison Blanche qui viendra à bout de ces forcenés, qu’il semble voir d’un assez bon œil ! Mais bon, il ne faut jamais perdre espoir : les Américains se sont bien débarrassés de Bush fils, ils finiront bien par terrasser son pénible successeur. La Démocratie saura retrouver le chemin de la victoire, et peut-être alors pourra-t-elle s’atteler plus efficacement à régler ce douloureux problème en déclarant une guerre sans merci au racisme et à l’antisémitisme. Certes, c’est loin d’être gagné, mais….Gémissons, certes, mais espérons !
Guy Zerhat