Pour la première fois, nous avons projeté un film dans un Collège de grande banlieue (Courbevoie). Cela sur trois demi-journées, avec trois débattrices différentes (et excellentes).
– La première était Mme Baba-Aïsa, remarquable comme toujours. Le film traite du harcèlement sexuel dont sont victimes les femmes du Caire. Cette séance a été la plus intéressante, avec des élèves attentifs et plutôt curieux. Ils ont bien réalisé que dans certains pays les femmes sont victimes d’une éducation sexiste, sous l’influence de la société et de la famille. Un viol est moins puni qu’un vol, et la femme qui se rebelle contre ces pratiques est méprisée. Notre débattrice leur a bien martelé que les femmes ont droit à la dignité, à la liberté et à l’égalité. En France, la loi sur le harcèlement sexuel ne date que de 2013. Toutefois, dans les relations hommes/femmes, il persiste des inégalités, à commencer par l’école, lors de la récréation, qui se poursuivent dans la famille et l’espace professionnel. En Egypte, rien n’a changé dans les mœurs, mais l’Etat a franchi une première étape : l’agression sexuelle est punie d’un emprisonnement qui peut aller jusqu’à 5 ans. En résumé, élèves curieux et attentifs, posant de bonnes questions.
– L’après-midi, la débattrice était Madame Carole Mann. Séance assez décevante, avec des élèves très indisciplinés, d’où l’intervention fréquente (et assez inefficace) de leurs professeurs. Quelques interventions intéressantes : si les filles restent muettes devant les tentatives d’agression, même verbales, c’est par timidité, parce qu’elles n’osent pas parler. Des préjugés sont tombés : par exemple, alors que souvent on dit que la femme qui porte des tenues trop courtes est vite catégorisée comme “pute”, dans le film, la femme agressée qui veut se venger est une femme voilée ! Sont alors passés en revue le viol, la répudiation et les lois religieuses, les préjugés, la censure (le film a été longtemps été interdit en Egypte !). Et nos élèves ont appris que dans certains pays nordiques, le congé de maternité est le même pour les hommes et pour les femmes, alors qu’en France, on a attendu 1945 pour que les femmes votent !
– Le lendemain matin, troisième séance, avec comme débattrice notre très chère Jacinthe Hirsch. Les filles ont été plus participantes que les garçons. Tous ont apprécié l’attitude du commissaire, qui vient d’être père d’une fille, et qui comprend d’autant mieux la gravité du harcèlement sexuel, dont pourrait être victime sa propre fille. Tous ont admis que le réalisateur du film s’était fixé pour enjeu de faire changer les préjugés qui voient la femme comme responsable des agressions quelle subit, et porte le déshonneur sur sa famille si elle porte plainte.
Pour résumer, si notre intervention a pu faire réfléchir quelques élèves, garçons et filles, nous aurons touché notre salaire.
Cette expérience a certes été profitable et utile, mais nous ne saurions la renouveler. Outre les difficultés logistiques, les élèves, dans leurs établissements, sont agités et indisciplinés, alors que dans notre belle salle parisienne, ils sont sages, curieux et disciplinés, heureux de sortir de leur “boîte” et d’être à Paris.
Un grand merci à nos trois débattrices pour leur courage et leur compétence.
Guy Zerhat