Alors que la xénophobie et le racisme progressent partout en Europe, l’Union européenne est confrontée à sa plus grave crise migratoire depuis 1945 avec l’arrivée de personnes migrant pour des raisons socio-économiques, principalement en provenance des Balkans et d’Afrique subsaharienne, et celle de personnes migrant en raison de conflits politiques, de guerres et d’États défaillants, en particulier de Syrie, d’Afghanistan, d’Irak, du Soudan et de Somalie.
Malgré leurs engagements, les Etats membres n’ont relocalisé qu’un nombre infime de réfugiés politiques depuis la Grèce et l’Italie ; les frontières sont contrôlées entre la France et l’Italie, l’Europe de l’Est et la Grèce. L’accord de 2016 passé entre l’UE et la Turquie a considérablement réduit le passage des réfugiés depuis la Turquie vers la Grèce, la police et les gardes-côtes turcs les en empêchant. L’objectif du sommet de la Valette est d’empêcher le passage des migrants depuis l’Afrique du nord, en particulier la Libye et l’Egypte, vers l’Europe. “Il est temps de fermer la route allant de la Libye à l’Italie” a ainsi déclaré Donald Tusk, réélu à la présidence du Conseil Européen. Rappelons qu’en 2016, près de 180 000 migrants sont parvenus en Italie, dont 25 000 mineurs isolés, et plus de 5 000 personnes sont mortes noyées pendant leur traversée.
L’UE va désormais financer les camps de migrants en Afrique, contraindre les migrants à déposer leur demande d’asile depuis ces mêmes pays, et détourner le regard de la violence extrême dont ces personnes sont victimes. Une enquête récente de l’OIM (organisme des Nations unies en charge des migrations) révèle que près de 70% des migrants africains ont été victimes des mafias, notamment en Libye : ces personnes ont été emprisonnées arbitrairement et ont subi des violences physiques, notamment sexuelles pour les femmes. Un trafic d’organes se développe à partir de l’Egypte et des migrants sont forcés de vendre notamment un rein pour payer leur passage vers l’Europe.
Cette violence extrême se poursuit pour des migrants arrivés en Italie : ils tombent sous la coupe des mafias nigérianes et italiennes, comme à Ballaro, le centre-ville de Palerme en Sicile, où le marché de la drogue et des centaines de jeunes femmes sont “tenus” par la mafia nigériane, elle-même sous le contrôle de Cosa Nostra…
Aucune politique à la hauteur des causes de ces migrations n’est pour le moment envisagée. Pire encore, les pays européens se referment sur eux-mêmes et l’on voit resurgir des camps d’internement, comme en Hongrie : les réfugiés et les migrants seront désormais parqués dans de grands conteneurs maritimes prévus pour 200 à 300 personnes, les camps seront sécurisés par de clôtures de fil de fer barbelé et des tours de guet. Alors que le président Trump va faire construire un mur entre les Etats-Unis et le Mexique, et expulser des millions d’immigrés, son administration vient d’annoncer la réduction de 50% de l’aide au développement et du financement des agences de l’ONU. Le proche futur se précise. La fermeture complète de nos frontières et le rejet des migrants et des réfugiés hors de nos pays, sans solidarité avec les pays les plus pauvres, auquel cas nous perdrions nos valeurs et l’essentiel de ce qui nous constitue, ou bien le maintien de l’accueil des réfugiés et la mise en oeuvre d’une coopération ambitieuse avec les pays du sud, dont chacun sait qu’ils seront les plus durement frappés par les effets du réchauffement climatique qui conduira des millions de personnes à se déplacer.
Rose Lallier