Elle s’appelait Sarah
Thème : la Shoah
Débattrice : Larissa Cain
C’est l’histoire de la petite Sarah envoyée au Vel d’Hiv avec ses parents, sans son petit frère qu’elle a caché dans un placard, pensant ainsi le sauver.
Larissa Cain, notre débattrice, n’est pas une rescapée du Vel d’Hiv mais une survivante du ghetto de Varsovie.
Elle commence son récit par quelques rappels d’histoire. Hitler, dès 1933, met en application son programme : la race germanique, descendant des Aryens, est une race « supérieure » qui a des droits sur les races « inférieures ». La race juive étant la plus « inférieure » il faut l’éliminer. Pourtant, précise Laïssa Cain, cette histoire de race est un mythe. Nous avons tous, quelle que soit notre couleur de peau, les mêmes constantes biologiques dans le sang.
Septembre 1939, c’est l’invasion de la Pologne. Dès le mois de Novembre on impose aux Juifs le port d’un brassard blanc avec une étoile bleue et on leur supprime le droit à l’éducation. Avec l’occupation de Varsovie le 28 Septembre 1940, la pression sur les Juifs s’accroit : le 16 novembre on les parque dans un ghetto dont on leur fera construire les murs de trois mètres de haut.
En fait, il y a deux ghettos, le petit ghetto et le grand ghetto. Ils diffèrent seulement par leur taille. Impossible de passer de l’un à l’autre, ce qui empêche de s’entraider ou de se réunir pour résister.
Par chance, l’appartement des parents de Larissa est sur l’emprise du ghetto. Ils n’ont donc pas à déménager. Par contre ils hébergent famille et amis et se retrouvent jusqu’à huit dans leur minuscule appartement. Larissa y est restée de Novembre 1940 à Décembre 1942. Elle réussit à s’en échapper toute seule, à 10 ans, en montant par une longue échelle en haut du mur de séparation et, morte de peur, en sautant dans la neige où un oncle l’attend. Au détour d’une phrase on apprend que sa mère est morte d’une dysenterie et que son père a été arrêté sans qu’on n’ait plus jamais de ses nouvelles. C’est donc une petite orpheline qui est trimballée de famille d’accueil en famille d’accueil jusqu’à ce qu’on l’envoie en France en 1946. Ce qui l’a sauvée, dit-elle, c’est le système éducatif de la France où, quelque soit sa nationalité, on est pris en charge par des professeurs qui savent vous encourager et vous permettre de vous réaliser.
Les élèves posent quelques questions : y avait-il du marché noir ? Du cannibalisme ?
Larissa Cain: « Je ne peux pas vous répondre, j’étais trop petite. Quand on meurt de faim tout est possible, probablement. »
Un adolescent noir demande: « Dans votre vie, avez-vous eu l’occasion d’avoir des affinités avec un Juif ? » Stupéfaction de tous. Le temps de reprendre son souffle : « Mais je suis juive ! J’ai des affinités avec des Juifs mais tout aussi bien avec des non Juifs. Les affinités c’est mystérieux. Il est important dans la vie de ne pas se cantonner à un petit cercle, de rencontrer des gens de toutes sortes pour mieux comprendre le monde où nous vivons. «
Certes, contrairement aux prévisions, ce n’est pas du Vel d’Hiv qu’on aura parlé, mais la rencontre avec un vrai témoin, une petite fille de 10 ans dans le ghetto de Varsovie, quoi de plus frappant pour nos élèves ? Ils en garderont le souvenir à jamais.
A la question sur les « affinités » avec un Juif, peut-être pourrait-on essayer d’y répondre en organisant un débat avec ces jeunes qui n’entendent, dans leurs familles et ailleurs, que des propos antisémites : Qu’est-ce qu’un Juif ? Est-il si différent de moi ?
Hélène Eisenmann