Les femmes du bus 678
Séance du 15 novembre 2016
Thème : la violence faite aux femmes
Débattrice : Bérénice Poussin (Association Terre des Femmes)
Vingt trois élèves d’une même classe, en majorité d’origine africaine ou maghrébine, ont assisté à la projection de ce très beau film où trois femmes égyptiennes, Fayza, Seba, Nelly, s’opposent, chacune selon son tempérament, au machisme ambiant.
L’une d’elles, Fayza, agressée, “pelotée” chaque fois qu’elle monte dans un bus toujours bondé, décide de se défendre par ses propres moyens avec une aiguille à chapeau violemment piquée dans les “parties” de son agresseur. Drames, enquêtes, prison. Tout comme ses deux amies elle se refuse à toute concession et à toute excuse.
Il a fallu la patience de notre débattrice aidée de Joëlle Saunière et de Guy Zerhat pour que la discussion s’engage. Mais ensuite les élèves ont suivi. Tous de la même classe et se connaissant bien, ils ont eu des échanges très vifs sur des sujets qu’ils n’avaient probablement jamais abordés entre eux. Ils se sont vite focalisés sur ce qui se passe dans le bus avec Fayza et son épingle, laissant de côté des aspects passionnants de ce film.
Sur le fond de l’histoire une fille s’exprime : “Au début ça m’énervait qu’on demande à la fille de retirer sa plainte, mais c’était touchant que son fiancé la soutienne”. Puis la discussion s’oriente sur la façon de s’habiller des filles.
Un garçon :”Il y a des filles qui s’habillent très mal. En Egypte c’est inacceptable, en France ça l’est.”
Une fille : “Les filles peuvent s’habiller comme elles le veulent. Les garçons n’ont qu’à se retenir.”
Une autre : “Même si une femme provoque avec une minijupe ça ne devrait pas faire ça. Il y a des femmes qui provoquent, d’autres pas.”
Un garçon :”Mais aller jusqu’à castrer les garçons? Jusqu’à taper dessus? Ça fait mal !”
Joëlle : “Tu ne perçois pas la violence de l’agression pour une femme? Tu aimerais qu’on fasse ça à ta sœur?”
Le garçon : “Mais on a tous droit à une deuxième chance. Castré c’est fini !”
La fille : “Ils sont pas castrés et la deuxième fois ils referont pareil !”.
Joëlle : “En France il ne faut pas se faire justice soi-même”.
La fille : “Elle s’est fait justice soi-même parce que personne ne la défendait. Elle voulait pas porter plainte pour que sa famille ne soit pas déshonorée”.
La débattrice: “Savez-vous combien de femmes portent plainte en France? Une sur dix !”
Guy: “N’oublions jamais la dignité de la personne humaine. Une fille bien roulée tu la regardes, d’accord, mais tu ne sautes pas dessus. On doit maitriser ses pulsions. On n’est pas des chiens. Même dans le bus. C’est ignoble”. Applaudissements.
La discussion dévie sur le fait divers jugé en ce moment en France : la femme qui a tué son mari après 40 ans de vie commune.
Une fille : “C’est pas normal qu’il la batte mais c’est pas normal qu’elle le tue. Elle aurait dû partir”.
Un garçon : “Si elle avait pas pu partir?”
Une fille : “Tu peux et tu dois partir.”
Une autre : “Moi je ne me fais pas battre, je pars à la première claque !”
La débattrice : “Et s’il s’excuse ?”
La même : “Tu pars !”
Une autre : “Le mari est plus fort, elle voulait pas le tuer.”
Une autre : “Avec un fusil elle l’a pas fait exprès ! On peut toujours partir, chez des parents, chez des amis.”
La débattrice: “Vous êtes jeunes, vous ne connaissez pas encore la vie, mais plus tard, n’oubliez pas vos bonnes résolutions.”
Guy, en conclusion : “Vous, les filles, faites vous respecter et vous, les garçons, on n’est pas des bêtes !” Longs applaudissements.
Belle leçon de morale.
Hélène Eisenmann